Aujourd’hui, Journaliste, c’est avec courage que Ossama Roxane sensibilise publiquement pour contribuer à stopper les mutilations génitales féminines en Côte d’Ivoire et partout dans la monde. Ci-dessous, son témoignage interpelle au respect de la personne humaine et de l’intégrité physique dans les coutumes. Ossama Roxane est, par ailleurs, Responsable de la Commission Communication de la Plate-forme de la Presse Numérique de Côte d’Ivoire – PNCI.

« A l’âge de 5 ou 6 ans, j’ai accompagné ma mère dans un village tout près de la ville où nous habitions. Nous y avons passé la nuit. Dès le lendemain, maman m’a noué un pagne autour du cou et m’a demandé de rejoindre les copines du même âge qui étaient déjà assises sur la terrasse. Tour à tour, en groupe de 10 nous-nous levions accompagnées d’une femme qui tenait une sorte de cloche comme pour faire  »laissez passer ». A chaque passage, les gens étaient admiratifs de ces fillettes courageuses qui partent à la chasse. En fait, on nous faisait croire qu’on partait à la chasse pour capturer des éléphants. Hé… oui! Tenez-vous bien « capturer des éléphants ». Arrivées dans cette sorte de brousse, notre guide nous faisait asseoir à même le sol. On nous demandait de fermer les yeux. ( J’ai fait semblant de les fermer). J’ai tout vu. Oui j’ai tout vu. Le sang, le couteau, les filles qui pleuraient lorsqu’elles sortaient de la sorte de cabane juste à côté. J’ai commencé à crier. Je pense que je me suis évanouie en ce moment là.

Quand je me suis réveillée j’avais toujours le pagne noué et ma mère à mes côtés. Bien que je senti mon sexe me brûler, maman me faisait croire que c’était normal. Et que j’allais guérir avec le temps. Une semaine après nous sommes rentrées chez nous. Mais la douleur était toujours là. Plus forte. Maman a fait appel à une guérisseuse. Elle a passé quelques jours avec nous. Lorsque ça s’améliorait, elle est rentrée chez elle.

Comme par enchantement, j’avais oublié cet épisode de la vie jusqu’à ce que je constate la différence de mon sexe avec celui de mes autres copines. (Entre temps je n’étais plus avec ma mère). Au fur à mesure que j’avançais dans les études, j’entendais parler d’EXCISION. Je posais des questions pour savoir. Je n’avais pas de réponse. Comme si le sujet était tabou. Jusqu’à ce que le roman de Fatou Keita intitulé Ce petit bout de moi-même m’ouvre les yeux.
Et là, le déclic, tout le film de ces semaines douloureuses s’est reconstitué dans ma tête. J’en voulais à ma mère (Trop tard, elle n’était plus là pour répondre à mes questions), j’en voulais aux intellectuels de ma famille. Comment avaient-ils laissé faire ça ? Pourquoi ? Eux qui savaient beaucoup sur cette pratique dangereuse, en tout cas plus que maman…

Aujourd’hui, j’ai plus de mal que de plaisir lors des rapports sexuels… J’ai peur.

J’en ai jamais voulu parler. Avec du recul, il était temps de sortir ça. L’excision marque à vie. STOP ❌❌❌ »