Pays producteur et exportateur de matières premières, l’application de la réglementation de l’Union Européenne (UE) représente un défi important pour l’économie de la Côte d’Ivoire. A cet effet, la 6ème édition de la « Journée du planteur PALMCI » ou « L’AS DE LA PALME » organisée du 20 au 21 septembre 2024 à Divo, dans la région du Lôh Djiboua renforce la sensibilisation auprès des acteurs des filières agricoles, en particulier, ceux de la chaîne de valeur huile de palme. Autour du thème, « EUDR, défis et opportunités dans la chaîne de valeur agricole : cas du palmier à huile », l’expertise de la Fondation Earthworm a posé les jalons pour relever le challenge d’une commercialisation de matières premières sans déforestation, fondement de la nouvelle réglementation EUDR.
« L’EUDR nous montre l’importance de faire attention à notre environnement, au peu de forêts qui nous restent et nous incite à nous engager résolument pour le reboisement », explique Gerome Tokpa, Directeur régional de la Fondation Earthworm. La Côte d’Ivoire se positionne comme 1er pays africain exportateur d’huile de palme et 2ème producteur après le Nigeria. Hormis cette matière première, plusieurs autres sont concernées par la réglementation EUDR.
« La règlementation EUDR de l’UE porte sur les sept(7) produits suivants : huile de palme, cacao, hévéa, café, bœuf et cuir, soja et bois », précise Gerome Tokpa. « Si ces produits sont liés à la déforestation, ils ne seront pas autorisés sur le territoire européen », indique le Directeur régional de la Fondation Earthworm. Dans son intervention, il énumère des solutions durables aux industriels, aux planteurs et à l’ensemble des filières agricoles. Il s’agit de « l’approche paysage » et d’un programme d’accompagnement pour la diversification des revenus. Afin, d’impacter le développement local, en plus de garantir le positionnement de l’agriculture ivoirienne comme une référence internationale. Autant pour sa productivité, sa qualité et ses pratiques durables et responsables.
« La dépendance vis-à-vis des produits de base a tendance à rendre les pays plus vulnérables aux chocs économiques », prévient Janvier Nkurunziza, responsable du service des produits de base à CNUCED (ONU commerce et développement). Dans le même temps, la pratique extensive de l’agriculture et de l’élevage arrive en tête des causes de la déforestation. « En 2022, la Côte d’Ivoire a exporté vers l’Union Européenne 44 232 tonnes d’huile de palme, qui représentent 12,6% du volume total des exportations », souligne le Groupe SIFCA leader dans l’agroindustrie. Outre, la place du cacao, de l’hévéa dans la production agricole locale invite les parties prenantes à s’approprier la réglementation EUDR. Ces deux matières premières précitées représentent 42,8% des exportations de la Côte d’Ivoire, respectivement 1er producteur mondial et 1er producteur en Afrique.
« Au-delà de la conformité avec la norme européenne EUDR, la Côte d’Ivoire a pris des engagements à travers la Contribution Déterminée Nationale (CDN) depuis l’accord de Paris que nous nous devons de respecter. Nous constatons tous les effets du dérèglement climatique. C’est une urgence environnementale », rappelle Gerome Tokpa. A ce propos, le gouvernement ivoirien a adopté un décret en 2021 pour interdire « l’exportation des bois bruts même écorcés ou simplement dégrossis, des bois équarris et des bois en plots ». Bien avant, en 2013 un précédent décret prescrit l’interdiction de l’exploitation, de la coupe, du transport, de la commercialisation et de l’exportation du Pterocarpuso ou « bois de vène ».
Cela dit, l’inventaire Forestier et Faunique National (IFFN) de la Côte d’Ivoire fait état d’une superficie forestière nationale de 2,97 millions d’ha avec seulement 517 000 hectares de forêt primaire. L’exportation de bois par la Côte d’Ivoire à destination de l’UE concerne l’Italie, l’Espagne et la Belgique, principaux marchés. La norme européenne EUDR et le dérèglement climatique invitent à repenser le modèle économique et la performance sociale des pays africains, à limiter leur exposition à la volatilité financière tout en utilisant les ressources naturelles pour garantir un bien-être durable et plus équitable. Avec une hausse de 9% par rapport à 2022, les exportations de la Côte d’Ivoire s’estiment à 17 Mds EUR en 2023.
Dans son approche holistique présentée lors du panel de la 6ème édition de la « Journée du planteur PALMCI », le Directeur régional de la Fondation Earthworm, Gerome Tokpa annonce des résultats à l’ouest de la Côte d’Ivoire, avec 1 160 planteurs bénéficiaires d’un programme de diversification des revenus et un reboisement de 1500 ha dans la forêt du Cavally, désormais surclassée en réserve forestière. L’édition 2024 de « L’AS DE PALME » démontre l’importance d’une synergie d’action pour relever les défis environnementaux. Ensemble, les parties prenantes présentes ont planté des arbres en plus de la mutualisation des expériences pour la mise en œuvre de l’EUDR.