La Plateforme de lutte contre la corruption et le chômage (PCC) porte plainte contre 8 000 fonctionnaires Maliens dans le cadre d’une campagne contre la mauvaise gouvernance dans le pays. Ces fonctionnaires sont accusés d’enfreindre les lois et de posséder des biens mal acquis. Selon la plateforme, chaque année, 250 milliards F CFA sont détournés en moyenne par des agents de l’État. Des chiffres avancés après compilation de rapports d’institutions nationales et internationales dont celui du Vérificateur général publié jeudi 11 juillet, de la Banque mondiale, du FMI ou de l’Agency Transparency. La corruption s’avère être un des freins majeurs au développement du Mali, estiment les responsables de la PCC. L’ampleur des dégâts est ahurissant, en effet. Les sommes détournées correspondent à « 1 785 centres de santé et 1 250 écoles » qui auraient dû être construites au profit des populations notamment pour l’accueil de 900 000 enfants à scolariser, déplore la Plateforme anti-corruption.

L’aboutissement de cette affaire portée devant les juridictions nationales s’avère hypothétique. À en croire la récente sortie de l’ambassadeur Allemand au Mali dans la presse locale, la justice est également gangrénée par la corruption. Dans une interview SEM Dietrich Becker confie : « Je n’encouragerais pas un Allemand à investir au Mali vu l’état de corruption de la justice ».

Ce fléau atteint les plus hautes sphères du pouvoir. Le président de la Commission de Défense du Parlement malien expose sa déception devant un important investissement opéré par le gouvernement. 4, 557 milliards FCFA dépensés pour l’achat de deux hélicoptères Puma au compte de l’armée. Les appareils n’ont jamais servi depuis leur achat en 2017, cloués au sol. Des carcasses. « Je me demande si, on n’a pas été floué à l’achat », déclare Karim Kéita. Aveu !

Les scandales de détournements et de surfacturation pour l’achat d’équipements de l’armée malienne sont nombreux sous la magistrature du Président actuel, Ibrahim Boubacar Kéita. Des milliards dépensés et détournés pour au final une armée impuissante et inefficace devant la menace terroriste. Conclusion: les terroristes tuent et détruisent les biens des populations sans grande résistance en face. La corruption mine tous les secteurs. Les pertes en vies humaines et les vulnérabilités des communautés ne sont-elles pas entretenues finalement ?

Le rapport du Bureau du Vérificateur général (BVG) révèle des irrégularités financières et budgétaires dans la gestion de collectivité territoriale et d’établissement public. Par ailleurs, le document évoque une gestion calamiteuses de services sociaux de forte sollicitation, dont les hôpitaux. Le CHU Gabriel Touré de Bamako et la Pharmacie populaire du Mali (PPM), chargée de fournir les centres de santé en médicaments après les tests nécessaires à leur homologation sont cités au nombre des mauvais élèves. Le CHU qui accueille le plus grand nombre de patients dans le pays et près de 90% des urgences dans la capitale Bamako, est confronté à un déficit dans sa gouvernance depuis 2017 au moins. Couplé à la faiblesse du plateau technique, le CHU enregistre des taux élevés de décès notamment infantiles. 24% des bébés venus au monde dans cet hôpital ou admis sur place sont morts en 2017, soit 96% de l’ensemble des décès survenus dans le CHU au cours de l’année indiquée. Seulement 20 examens médicaux sont réalisés contre 80 en principe quand le service pédiatrique est dépourvu de respirateur avec un total de trois couveuses pour un besoin de 60. Le Bureau du Vérificateur général révèle en outre la présence dans les centres de santé de médicaments non certifiés. Prescrits aux patients et consommés par ces derniers sans s’en douter. La négligence et les lourdeurs administratives au sein de la Pharmacie populaire du Mali sont mis en cause. En 2017, des médicaments périmés d’une valeur de 1,14 milliard FCFA ont été répertoriés dans les magasins de stockage de la PPM dans les mêmes rayons que les médicaments en cours de validité. Le commerce des médicaments prohibés est très répandu en Afrique de l’ouest.

Après avoir épluché les rapports de toutes les enquêtes de la Cour des comptes malienne sur la période 2005-2017, les enquêteurs constatent un gap de plusieurs milliards d’au moins 700 milliards FCFA( 1,13 milliards d’euros) détournés.
Les urgences talonnent. Mais, la classe dirigeante empochent les milliards prévus pour faire face aux multiples défis du pays tant au niveau de la meurtrière insécurité que sur le plan social où les vulnérabilités entraînent leurs lots de désolations au sein de la société malienne. Les soldats sont démotivés par l’embourgeoisement de la hiérarchie au prix de leurs vies et de leurs familles. La corruption et les abus de l’administration publique ouvrent béantes les portes de la radicalisation doublée d’une prédation de toutes parts.