• C’est une double peine pour ce supporter trentenaire aux « mollets têtus » dignes d’une recrue d’un tournoi local appelé « Comité ». Son rendez-vous galant s’est mal passé. Une journée de travail sacrifiée pour elle, pourtant.
    L’engouement grimpe, c’est le dernier week-end du mois. Ambiance footballistique CAN 2019 à Yopougon, la cité de la joie où la bière coule à flot en pareilles circonstances.

Près d’une heure à attendre, impatient. Gérard est prêt depuis 16h00. Le regard figé sur sa montre. Enfin, l’heure fatidique. Le coup de sifflet est donné pour le match. La Côte d’Ivoire joue une revanche contre le Maroc. Sa « belle équipe » joue. Assis dans un maquis, il commande une bière, ragaillardi par le but manqué des Éléphants dès la deuxième minute. Une hargne de courte durée. Le cours du jeu change l’humeur dans cet espace. Le Maroc prend de l’ascendant. Il domine. À la 23ème minute, c’est le but des Lions de l’Atlas. Les critiques sur la tactique mise en place par le coach ivoirien, les compétences des joueurs sur la pelouse se revisitent à chaque percée des Lions. « L’attaque ne vaut rien », entend-on ça et là. Sur le dossard d’un supporter, l’on peut lire « Gervinho ». Plusieurs ici pensent que le match aurait changé si « La jaguar » était sur le terrain. Les hypothèses ne manquent pas, en effet. Et, le découragement s’installent peu à peu. Le jeu des Éléphants ne convainc pas pour espérer une égalisation, rechigne une jeune supportrice.

La douleur est encore plus grande à mesure que les minutes s’égrènent, marquées par la domination de l’équipe marocaine.
Il est 18h passées de bientôt 40 minutes. Le muezzin de la mosquée voisine rappelle la prière. C’est la sourde oreille. Personne ne se presse. Aucun ne se lève devant le petit écran pour répondre à l’appel. Les plus dégourdis s’appliquent à reprendre leurs activités suspendues avec l’espoir d’une victoire. « C’est mal connaitre nos gars. Dire qu’on a pas travaillé depuis 15h-16h à cause d’eux, pour ça », regrette Mohamed dont le lavage jouxte la clôture de la mosquée. Une éponge à la main, qu’il aurait voulu appliquer au Maroc.
Pour ce match, plusieurs taxieurs ont immobilisé leur véhicule. « Les clients sont rares quand la Côte d’Ivoire joue. Et, nous aussi on veut regarder le match », explique Martial, l’un d’eux. Ce soir là, la circulation est très fluide depuis Saguidiba jusqu’au Keneya à Yopougon. Impossible de circuler ainsi à pareille heure, les autres jours.

Gérald fait parti de ces chauffeurs qui ont pris leur congé ce jour. C’est « un gâchis », rouspète le supporter malheureux. Il se lance dans un passement de jambes analytique. Selon ce dernier, rien n’est surprenant en fin de compte dans l’issue de cette rencontre, 1 but à 0 en faveur du Maroc au coup de sifflet final. « Notre entraîneur est l’élève de Renard, celui du Maroc », rappelle-t-il. Il ne manque pas de revenir sur la forte présence marocaine dans plusieurs secteurs d’activités en Côte d’Ivoire : tourisme, éducation, commerce, banque et autres. « Tout ou presque est à eux. On leur a tout vendu. Un match de football ne coûte pas plus cher que la baie de Cocody », lance Gérard de façon cocasse.

Le sport est un moment de rencontres économiques, culturelles et sociales. Au foot, sport favori en Côte d’Ivoire comme au Maroc les passions sont intenses. A bientôt sur les chantiers Marocains en Côte d’Ivoire. Les débats ne manqueront pas. « Découragement n’est pas ivoirien » dit-on!