L’indigence apporte son lot de morts avec des inondations en Côte d’Ivoire. Les hôpitaux aussi. Se loger et se soigner sont si compliqués. En l’espace d’un mois, deux personnes arrivées à l’hôpital pour des soins sont décédées dans des conditions douteuses, pour les cas révélés. Les scandales au niveau du corps médical se répètent.
Une parturiente au centre de santé de Yahou, au Sud du pays, n’a pu être évacuée à temps sur Grand-Bassam malgré l’urgence. Déficit de moyen de transport, clament les agents de la santé alors qu’une ambulance est stationnée dans la cours de l’hôpital. Défectueuse, selon le ministère de tutelle, comme la couverture santé universelle, une autre maladie sociétale.
Les populations quand à elles restent convaincues du bon état du véhicule. Pour elles, l’ambulance n’a pas encore été inaugurée, ce qui explique pourquoi les agents de la santé ne veulent pas la mettre en service. Le décès de la dame est constaté à son arrivée dans une clinique de Grand-Bassam, après des heures perdues à Yahoo.
Selon l’Agence française de développement(AFD), les taux de mortalité infantile et maternelle sont préoccupants en Côte d’Ivoire. « Le pays affiche encore l’un des plus forts taux de mortalité maternelle au monde », indique l’institution engagée avec le gouvernement local dans la lutte contre ces drames évitables. D’autres travaux classent le pays dans un flop 10 de mortalité maternelle, à la l’échelle mondiale. En moyenne 20 femmes meurent en couchent chaque jour en Côte d’Ivoire.
« Décidément, en Côte d’Ivoire, aller à l’hôpital ne garantit pas », déplore quelques jours après le décès de la femme enceinte un citoyen sur la toile. Une colère doublée d’une inquiétude justifiée. Plutôt, en début du mois de mai, un décès déshumanisant est signalé à Gagnoa. Le souffrant est refoulé du CHR de la ville par le personnel sans soins. Le corps du jeune homme, souffrant d’une hernie inguinale, est retrouvé quelques minutes après son éviction des locaux de l’hôpital dans les rues. Un cas urgent, reconnaissent pourtant les médecins. Ces derniers justifient par la pauvreté du plateau technique. Dans le pays, c’est une pilule injectée régulièrement dans l’opinion à la survenance de drames dans les établissements sanitaires. Ce qui n’occulte pas la nature des compétences internes.
Le pôle économique, Abidjan, enregistre lui aussi sa liste de scandales. En début d’année, la mort, du fait de « négligence » d’un accidenté au CHU de Yopougon provoque la colère de ses proches. Ces derniers s’en prennent au matériel et aux travailleurs, au motif que ceux-ci n’ont pas convenablement pris en charge le patient. Un énième drame imputé à la qualité des soins prodigués.
Conscients, semble-t-il de la qualité douteuse des soins de santé dans le pays, les dirigeants se soignent à l’étranger. Impossible pour le peuple avec une majorité encore dans la précarité, irritée par les échos d’une croissance remarquable depuis des années aux fruits invisibles. Comme souligné la couverture santé est encore au stade de test.
Plusieurs ivoiriens et ivoiriennes se tournent de plus en plus vers la religion à la recherche de la guérison. Les lieux de cultes sont plus accessibles et disponibles que les centres de santé. La preuve, dans la seule ville d’Abidjan, on dénombre plus de 6 000 lieux de cultes contre quelques 2 000 établissements sanitaires de premiers soins dans toute la Côte d’Ivoire.
« Finalement, on doit faire confiance au miracle ou à la médecine ? », questionne Aïcha, la trentaine. Elle habite dans une commune dépourvue de Centre Hospitalier Universitaire. C’est la deuxième plus grande commune du pays. La jeune fille attend son premier bébé dans sa chambrette de Plaque Anadore à Abobo. La saison pluvieuse est agressive et à Abidjan au moins 1,2 million de personnes, soit presque le tiers de sa population ne peut jouir du droit à un logement. Les inégalités sont béantes, dans cette vitrine du pays, où le taux de pauvreté atteint 29%.