« Si avant le premier tour, l’un des candidats d’une liste de candidats retenue par le Conseil constitutionnel se trouve empêché ou décède, le Conseil constitutionnel peut prononcer le report de l’élection dans les soixante-douze heures, à compter de sa saisine par la Commission indépendante chargée des élections. », Alassane Ouattara(ADO) ou/et Kouadio Konan Bertin(KKB) peuvent donc faciliter le report de la présidentielle en Côte d’Ivoire. Le Président de la République sortant, ADO, confirme lors d’une interview avoir la constitution dans sa « poche » mais pour Laurent Gbagbo « c’est lui qui a commis la faute». Décryptage !

Yopougon Figayo, le RHDP tient son meeting de campagne dans une zone réputée favorable à l’opposition. C’est la commune la plus populaire de Côte d’Ivoire. Aucune violence n’est enregistrée. Dans les buvettes aux alentours, des partisans à ce meeting partagent leur pécule perçu pour la mobilisation. L’un d’eux a acquis de nouveaux pantalons et ambitionne renouveler sa garde robe au cours de cette campagne controversée plongée dans la corruption et le communautarisme. Suite à une diffusion fallacieuse de la chaîne de télévision France 24, musulmans et chrétiens, citoyens de tous bords politiques confondus ont protesté sur la toile, ensemble. C’est pourquoi, au regard d’une telle faculté de discipline et d’union du peuple, Laurent Gbagbo persiste qu’un «  dialogue » peut résoudre « les querelles politiques» en Côte d’Ivoire.

« Sans ambages » , cela dit, Alassane Ouattara ne respecte pas sa propre constitution et une telle suprématie sur les règles finit par « agacer ». Au gré de ses ambitions, il interprète la loi fondamentale et estime que le report de l’élection est anticonstitutionnel, alors qu’il suffit que sa mascotte KKB et lui même écrivent au Conseil constitutionnel.

Sur le trajet Abidjan-Daoukro, ce ne sont pas les forces de défense qui diront le contraire. Les barrages dressés malgré les chars étaient un signe d’agacement. L’armée effectue ce trajet en 24h au lieu de 4h de route. Qu’en sera-t-il des opérateurs économiques vu l’isolement géopolitique interne d’Alassane Ouattara.

« Je vous invite à sortir massivement, ce samedi 31 octobre 2020, pour faire le choix d’une Côte d’Ivoire plus Solidaire, une Côte d’Ivoire Meilleure.», lance Alassane Ouattara, alors que les récentes sorties massives scandent un autre message que celui d’un vote ce 31 octobre et le qualifient de dictateur et solitaire. En effet, « le Président de la République est élu pour cinq ans au suffrage universel direct. Il n’est rééligible qu’une fois. », stipule l’Article 55 d’une constitution écrite en 2016. Avec la précision selon laquelle, « la législation actuellement en vigueur en Côte d’Ivoire reste applicable, sauf l’intervention de textes nouveaux, en ce qu’elle n’a rien de contraire à la présente Constitution » Article 183. Et cette loi a juste été reconduite.

En l’espace de quelques jours, au cours d’entretiens accordés à des médias français, Alassane Ouattara prétend qu’il veut passer le pouvoir à une autre génération, avec de nouvelles clauses constitutionnelles, mais n’est pas situé sur son vice président ni sur un possible maintient au pouvoir pour une décennie. Selon sa logique, une nouvelle République avec l’actuel article 55 lui garantit vingt ans au pouvoir en plus des deux mandats précédents, s’il ne trouve pas d’hériter et vive la démocratie. Vraisemblablement, un retour sans nom au parti unique déjoué selon l’opposition par l’échec du RHDP. Ce parti d’Alassane Ouattara s’accapare d’ailleurs les logos de l’opposition sur le bulletin de vote.

« Si c’était Amadou Gon Coulibaly, Amadou les aurait battu parce que c’est le parti qui fait l’élection», assure le président sortant. Pourtant, il insiste pour candidater dans l’instabilité sociale.

« Le Président de la République est le Chef de l’Etat. Il incarne l’unité nationale. Il veille au respect de la Constitution. Il assure la continuité de l’Etat. Il est le garant de l’indépendance nationale, de l’intégrité du territoire et du respect des engagements internationaux », c’est écrit noir sur blanc sous l’article 54. Voici que, les décisions de la Cour Africaine des droits de l’homme et des peuples(CADHP) et celles de la Cour pénale Internationale (CPI) ont été foulées au pied ou appliquées sans équité. Selon la constitution, « le Président de la République assure l’exécution des lois et des décisions de justice(…)», mentionne l’article 65.

« Discutez, parlez ensemble…Toujours. Il est toujours temps de le faire, il est toujours temps de parler[…] Dans ce combat qui se mène aujourd’hui autour du troisième mandat, je suis moi Laurent Gbagbo, ancien chef d’Etat, ancien prisonnier de la CPI, je suis résolument du côté de l’opposition. Je dis, vu mon expérience, qu’il faut négocier, un appel exclusif, une posture sage face à des viols répétitifs de la loi fondamentale. Pour celui là même qui par une décision exclusive permettra la candidature d’Alassane Ouattara en Côte d’Ivoire.

Outre, le Président de la République a la latitude de conduire la politique de la Nation jusqu’au 31 octobre 2020. Alassane Ouattara en tant que Président de la République de Côte d’Ivoire, en fin de mandat, peut à travers un simple message à la nation impulser la paix par une reforme institutionnelle inclusive conduite par un vice-président consensuel.

Dans le Moronou plusieurs jeunes de différentes communautés se sont rassemblés pour dresser et lever les barricades. Un chauffeur de grumes est nourri sans être violenté malgré la réquisition du véhicule. Les communautés partagent une volonté de paix à entretenir avec des « règles claires et respectées ». Pour Laurent Gbagbo, le défi se trouve là, au cœur d’un héritage intellectuel pour garantir la durabilité économique. « Ce pays, c’est leur pays, nous qui avons aujourd’hui un certain age. Mais surtout, nous qui sommes de cette classe politique qui a géré le pays depuis Houphouët Boigny jusqu’à maintenant, notre rôle c’est de faire en sorte qu’après nous, nous laissions aux générations futures un pays avec des règles claires et respectées », un message de paix durable par l’exemplarité et la remise en cause adressé par Laurent Gbagbo.

A peine 40% des électeurs possèdent une carte pour voter. Le processus d’identification bâclé à cause du coût, de la crise de la Covid-19 et des arnaques administratives n’a pas permis aux populations de jouir pleinement de leurs droits élémentaires. En 2015, pour le deuxième mandat d’Alassane Ouattara, seulement la moitié des inscrits s’est exprimée faute de réconciliation, 3 129 742 sur 6 301 189, pour un taux de participation d’à peine 50%.

Un an après

Octobre 2016, des marches contre l’actuelle constitution qui fait du président un dieu qui règne sur la République. Dix jours plus tard, le 1er ministre français était en route pour Abidjan, le Dimanche 30 Octobre 2016, jour du référendum annoncé. Quatre ans après, en ce mois d’octobre 2020, la Côte d’Ivoire est suspendue entre violences armées et soulèvements populaires pour refuser un troisième mandat présidentiel controversé et dissimulé par l’élaboration de cette constitution. Une loi fondamentale que le président taille et interprète selon ses désirs. Il envisage d’ailleurs, sous le regard de la communauté internationale, d’instrumentaliser davantage la Justice contre ses adversaires politiques. Ce sera « la perpétuité » pour les moins chanceux. Voici l’Afrique avec 77% de jeunes, dans l’instabilité et l’insécurité globale, alors que c’est la rentrée scolaire. Tant de TPE et PME bâties avec les maigres économies sombrent dans cet environnement juridique autocratique affiché par les crises en Guinée et en Côte d’Ivoire. Quand, l’État prétend encourager à l’entrepreneuriat. Les luttes citoyennes pour l’État de droit souffrent du manque de fermeté des mécanismes de justice sociale et de défense des droits de l’homme. Voir des jeunes mourir faute d’Etat de droit émeut moins Alassane Ouattara et Alpha Condé. La décapitation d’un professeur en France suscite une émotion « inqualifiable » chez ADO, comme témoigne sa réaction lors de son interview avec France 24, en plus des précédentes marches de soutien des députés d’Afrique francophone lors d’attaques précédentes. Une décennie après sa déportation à la CPI, Laurent Gbagbo appelle la classe dirigeante en Afrique à une auto-éducation et pointe les élites comme responsables des crises.