C’est la panique à St André, carrefour réputé de la commune de Yopougon(Yop). Des individus se signalent, machettes, et multiples armes blanches grincées sur le bitume. Cette soirée du Mardi devient un enfer à deux pas de l’Eglise. Quelques causes de ce fléau environnent la chapelle. Le narcotrafic a implanté ses officines, ses bibliothèques et des musées à la portée des enfants comme des adolescents.
À l’image des pharmacies ou autres activités légales, les échoppes de drogues ont leur propre géolocalisation dans la plus vaste commune de Côte d’Ivoire, Yopougon. Un annuaire tenu de part et d’autre par les dealers et les corps habillés. Outre, pour tout civil, la maîtrise de la cartographie des fumoirs, hauts lieux de la délinquance qui se repend dans l’environnement immédiat et au-delà, est un sauf-conduit.
Dans l’univers de la drogue, il faut savoir où mettre les pieds. Quand ce soldat visite une parente dans ce quartier précaire situé à quelques encablures du commissariat du 16ème arrondissement, un frère d’arme, un gendarme, est tué non loin. Ce jour là, faisant fi de toutes les indications de son hôte, le visiteur arrive dans la zone « comme s’il connaissait déjà le quartier », témoigne la parente.
Son point de repère, un fumoir logé au fin fond du quartier. Le militaire est pourtant loin de son lieu de service, au nord de la Côte d’Ivoire. Mais, il connaît l’Atlas par cœur.
La police nationale a présenté le 8 août, lendemain de la fête nationale, son bilan à mi-parcours de l’opération « Vacances sécurisées ». Les autorités comptabilisent plus de 300 fumoirs détruits en seulement 16 jours d’intervention dans le pays. Paradoxalement, c’est le même nombre de fumoirs détruits durant toute l’année scolaire écoulée. Les mêmes endroits ont-ils été visités à nouveau pour cette dernière opération ?
Le poste de police du 16ème arrondissement à quelques pas de St André est pris en étau par le trafic de drogues. En face du commissariat, le quartier Yaosehi abrite une fumerie connue de tous. Elle résiste malgré les assauts répétés de la police.
Sur la bretelle du pont à gauche du commissariat, un autre fumoir survit après une récente descente policière dans la place. Détruit, il renaît aussi de ses cendres. Le « carrefour voleurs » avec ses nombreuses agressions de riverains officialise la délinquance signalée dans ce secteur. Les jeunes de Doukouré et Sicobois, quartiers mitoyens, ne font pas qu’assister à ce manège d’insécurité. Des collèges de délinquants font du périmètre leur terrain de chasse.
Pas plus d’un kilomètre ne séparent chacun des deux fumoirs du commissariat. Les fumoirs sont plus accessibles que les infrastructures de base. Aucune bibliothèque publique ni aucun espace vert à rencontrer ici. Quand, l’hôpital public le plus proche, PMI, est à plusieurs kilomètres.
Un caïd de la commune localise d’autres lieux. Un peu plus en retrait, quatre(4) fumoirs assurent le cordon derrière le Palais de justice de Yopougon : à Kimbli, Mami-fête, Kouté et au Koweït. La fumerie de Kouté, quartier le plus proche du tribunal, « abrite le fumoir le plus en vogue en ce moment dans la zone », confie le dealer. Ce Mardi jour de l’offensive au carrefour St André représente un jour de grande fréquentation pour cet endroit, le marché populaire de Kouté reçoit du monde. La voie express est réputée dangereuse.
En passant par le fumoir du préfet d’Abidjan toujours en puissance malgré son passage, le décompte continue. Le nom de Port-Bouët 2 ne saurait manquer dans l’Atlas, fait comprendre un adolescent, « décalé ». Petit duvet au menton, la puberté se constate sur son visage métamorphosé par la drogue. C’est son quartier. L’un des plus dangereux de toute la commune. Le jeune homme est un charretier à Siporex. Entre ses courses, il s’éclipse pour « s’inspirer ». La vitrine de Yopougon abrite également son fumoir, selon plusieurs sources. Pis, la majeure partie des quartiers de la commune détient des antres exposant les usagers de drogues ainsi que les familles. L’intérieur du pays de plus en plus aussi. En réaction à cette généralisation des stupéfiants sur l’ensemble du pays et leur accessibilité, ce dealer interroge : « Est-ce qu’un quartier peut manquer de boutique ou de marché ? ». Dans son marché, il attend le retour des vacanciers avec impatience. La rentrée scolaire est propice pour ses affaires. Pour l’insécurité, elle commence à domicile dans les familles. Cet atlas est juste une démo. Ne le complétez pas, Agissez !